Cahiers du Sud

 

Octobre 1929

Georges Pillement

 

L'ECOLE DES FEMMES, par André Gide (N.R.F.).

 

 

Une question se pose tout d'abord : quelle importance donnerait-on à cet ouvrage si on ignorait qu'il est d'André Gide ? Cette question se pose d'autant plus que le désir de se renouveler, de retourner sa veste, a conduit l'auteur dans des voies absolument différentes de celles qu'il avait suivies jusqu’ici. Un retour à la ligne la plus battue du classicisme. Par ces tours de force de construction comme dans les Faux-Monnayeurs. Deux parties, deux récits d'un ton différent. La jeune fille avec ses illusions, la femme mariée avec ses désillusions : l'égoïsme du mari s'est révélé, l'idole s'est effondrée. Il ne nous reste donc qu'une chose à louer : la psychologie des personnages, mais nous pouvons le faire sans réserve. Les types qu'André Gide a créés ne s'effaceront pas de sitôt de notre mémoire, bien des hommes pourront se reconnaître dans celui qu'il a dépeint, bien des femmes se retrouveront dans son héroïne. Il y a là tout un jeu de sentiments : la franchise, le naturel opposés à l'hypocrisie, à l'artificiel, qu'on n'avait jamais dévoilé avec autant de perspicacité. On ne pourra plus parler du satanisme d'André Gide, ce livre est non seulement un livre moral, c'est un livre qui rassure les honnêtes gens, les sincères, ils soupirent, voici enfin la fausseté dévoilée. C'est un livre à faire lire à tous les jeunes filles : car c'est vraiment L'« Ecole des Femmes ».