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Les Revues
Contre M. Henri Massis qui l’attaqua dans la Revue
Universelle, M. François Mauriac prend la défense de
M. André Gide, dans L’Université de Paris. Et son article
serait tout entier à citer. Bornons-nous, s’il se peut, à
en donner quelques passages.
M. Massis a reproché à M. Gide de n’avoir voulu exprimer
que sa jeunesse « sans souci d’exprimer rien d’autre et ne souhaitant
que de l’exprimer mieux ».
Et M. Mauriac de rétorquer :
« A ce goût de la perfection, à ce scrupule, accordons
une valeur même morale. Un livre de Gide nous est une leçon
de mesure, de renoncement, — renoncement formel mais qui intéresse
aussi le cœur. Apprenons de lui le refus des succès faciles
et cette dignité de l'écrivain qui est, Massis, une
éminente vertu. »
Et plus loin :
« Une pratique plus ancienne du catholicisme vous aurait révélé
le secret de Gide. Il dut être de ces enfants dont on dit dans
nos familles chrétiennes : il a la vocation. Car cet homme
si ondoyant fut toujours la proie d'une fixe passion : agir sur les
jeunes cœurs. A ce signe reconnaissons l'homme prédestiné
à l'apostolat. Mais, né hors du bercail, que ferait-il
de ce redoutable don ? Il joue, il s’en divertit. Ce don lui devient
une fin en soi. N'empêche que son œuvre rend témoignage…
»
Et enfin :
« …Gide démoniaque ? Ah ! moins sans doute que tel ou
tel écrivain bien pensant qui exploite avec méthode
l'immense troupeau de lecteurs et surtout de lectrices « dirigées
», — et pas plus que Socrate, accusé de corrompre la
jeunesse parce qu’elle apprenait de lui à se connaître.
Il me souvient d'avoir entendu Gide défendre le Christ contre
Valéry, avec une étrange passion : attendons le jugement
de Dieu. »
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